S'identifier - Contact

Les Kelloucq en voyage

Mardi 02 Décembre 2025

A l’écoute des proches aidants : du répit à la rêverie






















A l'écoute des proches aidants : du répit à la rêverie, Hélène Viennet (Seli Arslan, 2020)

Voici quelques citations qui m'ont frappée dans ce livre magnifique.


p. 102

« Le pédiatre oncologue Matthias Schelll propose la définition suivante du répit:

(C’est) un besoin naturel d’un lieu ou d’un temps de repos, ressenti ou non, d’une personne placée dans une situation pénible, contraignante et continue, face à des douleurs et des symptômes difficilement soulagés, sans possibilité de rupture.


Etablir le répit en tant que « besoin naturel » c’est monter que ce souhait n’a rien de pathologique ; ce n’est être ni malade, ni malveillant que d’en ressentir le besoin. »


p. 105

Un répit pour qui?

Un répit pour les personnes accompagnées

« Etre malade, immobilisé, être dépendant d’autrui, c’est entendre de loin les bruissements de la maison, c’est être présent sans pouvoir être actif, c’est laisser sa place à l’autre pour cuisiner, faire le ménage, organiser la vie quotidienne. Etre dans une telle situation oblige à des adaptations et souvent à des renoncements, car rien n’est jamais fait comme nous aurions aimé le faire nous-même. Ainsi, le lavabo n’est jamais tout à fait assez propre, le café toujours trop froid ou trop fort, la soupe a un goût bizarre, les draps ne sont pas assez tirés, etc.

Etre malade, dépendant, c’est sentir que l’on dérange, que l’on empêche la réalisation des projets, qu’à cause de nous tout est bouleversé.

Etre malade, dépendant, c’est entendre au loin des bruits familiers. Cela peut être rassurant et propice à la rêverie si l’atmosphère de la maison n’est pas trop électrique (tendue, anxieuse, angoissée), mais devient vite intolérable lorsque tout est tension et fatigue. Tenir, faire bonne figure peut être bien souvent épuisant et demander ou accepter de l’aide peut être intolérable tant la peur est grande de rajouter stress et déséquilibre. Il devient si difficile de dire ses ressentis. Comment nommer, énoncer, partager ce que l’on ressent? »



p.107

Un répit pour qui?

Un répit pour les personnes proches

« En outre, comme déjà indiqué, demander de l’aide pour soi-même en tant qu’aidant semble souvent incongru : « Ce n’est pas moi qui ai besoin, c’est lui/elle ». Par conséquent, il est fréquent que les proches se négligent. Ils ne s’accordent pas beaucoup d’importance et remettent au lendemain le soin de leurs douleurs qu’ils minimisent.

C’est souvent en allant au-devant d’eux, non pas pour leur proposer de l’aide mais afin qu’ils parlent de leur parent malade, handicapé et/ou dépendant qu’ils pourront, petit à petit, évoquer leurs difficultés personnelles. C’est en parlant d’abord de leur proche malade, handicapé, dépendant, vieillissant, de leur proche dont ils se préoccupent jour et nuit que les aidants pourront parler d’eux-mêmes. Il est aussi essentiel d’aller vers eux sans leur assener qu’il faut qu’ils se reposent, qu’ils ont absolument besoin d’aide et ne peuvent plus faire seuls ; cela ouvre de nouvelles perspectives. En effet, les proches savent bien qu’ils ont besoin de se reposer, mais ils ne savent pas comment faire. Si l’on va vers eux pour leur demander comment ils se sentent, leur premier mouvement sera souvent de dire : « Tout va bien » tant ils ont peur d’être jugés. « Moi, fatiguée, lasse ou énervée? Jamais! ».

Lorsque les proches parlent enfin d’eux-mêmes et demandent de l’aide, entendons-les vraiment et tentons de leur répondre. Mais prenons aussi toujours le temps de les entendre avant de faire. Les proches ont besoin pour parler, d’être approchés avec délicatesse, d’être soutenus. Ils ont besoin de partager afin de découvrir ce qui pourrait les soulager. Ils sont si sollicités, si indispensables et si peu reconnus. Eux-mêmes seront alors souvent surpris par tout ce qu’ils pourront énoncer. »



p.109

Un répit pour qui?

Un répit pour les soignants

« Il peut également être usant de constater chaque jour l’aggravation de l’état de santé des patients malgré les chimiothérapies et autres traitements lourds, de se sentir impuissants, incompétents ou si las.

Parfois la simple perspective d’un ailleurs, d’un autre lieu possible pour le patient ou ses proches peut ouvrir, pour les soignants, un espace permettant de penser…

Evoquer un tel projet entre les différents membres d’une équipe redonne du mouvement et permet d’éviter que la maison ou le service soit englué dans une répétition mortifère. Si celui dont on s’occupe n’est plus ni vu, ni entendu avec étonnement, si ses demandes ou ses réactions sont toujours déjà attendues, le désir s’étiole. L’immuabilité de la situation risque de couper de la surprise de la rencontre. »


p. 117

Se protéger de la violence de ses émotions

La terreur face aux éprouvés

« La maladie, le handicap, la dépendance représentent une entrave pour la personne concernée et pour tout l’entourage. C’est une entrave physique - car il n’est plus possible de faire les mêmes choses - et une entrave psychique.

La maladie, l’état de dépendance confrontent à mille pensées inexprimables, inavouables, des pensées qui font peur, qui parfois se transforment en passage à l’acte, surtout s’il y a aucune oreille pour venir les y déposer. Que faire de toutes ces pensées qui assaillent, de tous mots si durs que l’on préférerait n’avoir jamais prononcés, de tous ces gestes que l’on regrette ensuite? Et comme nous l’avons vu, ces pensées, à l’origine de la nécessité d’un projet de répit, concernent aussi bien la personne aidée, sa famille, l’entourage que les aidants.

Rage, injustice, tristesse, colère, étonnement, fragilité, force, bonheur, peur, dégoût, espoir, surprise, fatigue, épuisement, fierté, confiance, joie, honte, soulagement : tous ces affects débordants, ces éprouvés sont bien complexes et intriqués. Sans chercher à les canaliser, sans chercher immédiatement à apaiser ou trouver des solutions, il convient d’abord d’être à l’écoute. Cela permettra de repérer les organisations bancales mais qui marchent, de sentir dans l’atmosphère ce qui tient et ce qui craque. »



p. 147

« Lorsqu’une personne aidée et sa famille font l’expérience intime que quelqu’un peut s’intéresser aux « petits riens » qui font la vie et aussi entendre, comprendre, ne pas s’affoler, contenir, soutenir, reconnaître efforts, ennuis, mauvaises pensées ou rêves encombrants, la fenêtre s’ouvre sur des rêveries partagées révélant que les mystères intimes peuvent devenir plus lumineux.

Les proches aidants, moins terrorisés par leurs cauchemars diurnes, par leurs cauchemars nocturnes et par leurs rêves les plus fous, ouvrent alors, avec un autre, un espace de rêverie qui redynamise l’étonnement de la vie. »


« La rêverie est définie par le Larousse comme « une activité mentale dirigée vers des pensées vagues, sans but précis ». Etre perdu dans de continuelles rêveries, c’est se trouver dans une sorte d’état de rêve éveillé où l’imagination sinueuse associe librement, sans s’attacher à une image en particulier, comme si l’âme flottait. La rêverie vagabonde, crée ce qu’elle rêve, procure un autre rapport au monde et à soi. »



p. 151

Comment retrouver un espace de rêverie?

« Du fond de son lit, le malade, la personne alitée, immobilisée, est comme exilé du monde. Contraint par son corps douloureux, trop faible, ses rêveries deviennent de plus en plus impossibles.

Le proche, assigné à rester à la maison, semble lui aussi souvent perdre sa faculté de rêverie. Mais est-ce vraiment le cas? N’est-ce pas plutôt la capacité de savoir qu’il a encore des rêveries qui lui fait défaut?

La pratique m’a appris que les rêveries pourront se retrouver si celui qui vit au quotidien l’expérience si extra-ordinaire d’accompagner rencontre un autre pour la partager. Car les rêveries - faites d’images qui affluent sans capacité parfois de les penser - peuvent être comme en attente d’un autre rêveur permettant de les rêver ; d’ « un penseur pour les penser ». »


p. 159

 

« De son côté, le proche suffisamment bon sera celui qui supportera une part d’incompréhension, d’imperfection, d’inadéquation, mais qui sera toujours accueillant à ce qu’exprime avec son corps, ses maux ou ses mots ce malade-là. Les ressentis négatifs projetés pourront être accueillis et pourront se convertir.» 

kelloucq - 21:44 - rubrique Actualités - Version imprimable - Permalien - 0 commentaires

Dimanche 09 Novembre 2025

Une conversation avec ma mère

Quelle différence en 15 jours! La semaine dernière, je ne suis pas venue voir mes parents car la visite d'amis californiens m'a retenue à Paris tout le weekend. Ma tante m'avait fait un "rapport" de sa visite du weekend et Emma m'a aussi raconté sa visite, avec une sortie en ville, il y a deux jours. J'avais aussi des appels de mon père - nombreux, pluisieurs fois par jour le plus souvent - pour me faire une idée sur son état de confusion qui semble s'installer.

Aujourd'hui, à l'arrivée dans leur chambre, je trouve mon père que j'avais averti d'un coup de fil avant de prendre la route. Il n'est pas 11h30, mais il est obsédé par l'idée que nous partions séance tenante pour le restaurant. Toutes les deux minutes, je dois l'assurer que nous avons un peu de temps pour bavarder. Ma mère a passé la matinée dans l'unité de vie protégée. Nous allons la chercher. Je ne suis pas sûre que mon visage lui évoque quelque chose quand elle me voit et elle nous dit qu'elle ne sait pas où elle est, mais elle vient volontiers avec nous. Direction le restaurant de la maison de retraite, nappe blanche et serveuses en tenue pour un service à l'assiette. On profite de cet endroit clair, à notre table préférée qui donne sur le jardin.

Je vois pour la première fois le résultat de décisions prises ces derniers 15 jours, soit à ma demande, soit sur proposition des serveuses et de l'ergothérapeute pour aider mon père : la viande du plat principal hachée, des couverts ergonomiques de prise plus facile et une sorte de cercle à bord haut qui s'installe sur le bord de l'assiette pour attraper plus facilement la nourriture. Je m'émerveille devant ces astuces qui facilitent la vie. Grâce à la kiné respiratoire qui a suivi un passage aux urgences, mon père respire visiblement mieux.

Mais avant la fin du repas, il s'épuise. Je l'aide à manger. Ce n'est pas suffisant. Il s'endort à table et veut rentrer à la chambre pour la sieste. Avec ma mère, nous le raccompagnons, l'installons le plus confortablement possible dans son fauteuil roulant basculé en arrière et le laissons dormir pendant que nous retournons prendre un dessert et une verveine.

Je rapproche ma chaise pour parler plus facilement avec ma mère. Et là, elle réussit à lâcher ses sempiternelles questions ("Où sommes-nous?", "Pourquoi on n'est pas chez nous?") et son autre phrase rabachée ("Je préfère crever"). La conversation sort des sentiers battus et rebattus. Elle exprime d'autres choses qu'elle ressent et qui ont du sens. "Ce n'est pas facile d'être enfant. D'abord on se fait fâcher quand on est petit et puis maintenant on vous embête". "Nous, c'est pas facile, mais vous non plus." "Il faut que vous profitiez de la vie". Peut-être ce qui fait du bien, très égoïstement, est qu'elle n'est plus dans l'impasse de sa propre confusion, perdue.

Pendant quelques instants, ma mère se comporte comme une mère qui réussit à s'extraire de ses propres préoccupations pour se soucier de son enfant. Au milieu du vaste océan de l'accompagnement (les questions administratives, médicales, financières, pratiques et les petits traumatismes vécus chaque fois que je les vois de plus en plus dépendants, de moins en moins eux-mêmes comme je les ai toujours connus), je séjourne pendant quelques minutes sur une île où ma mère est ma mère et où je suis sa fille. Où elle prend soin de moi et se soucie de moi. J'essaie d'imprimer cette impression dans mon cerveau et dans mon coeur pour qu'elle me soutienne dans les temps à venir.

kelloucq - 15:37 - rubrique Actualités - Version imprimable - Permalien - 0 commentaires

Dimanche 26 Octobre 2025

Une journée simple

Rien d'extra-ordinaire dans cette journée, seulement une succession d'activités et d'états très simples et agréables.

Ce samedi matin, démarrage de Paris par le train de 7:31, histoire d'arriver à temps pour faire un tour au marché et pour récupérer mon panier du Déclic Paysan.

Petite marche pour récupérer des feuilles d'automne (des feuilles mortes!) que j'ai plus tard arrangées sur un mur dans une "guirlande" très automnale.

Préparation d'un déjeuner à base de chou kale en écoutant un podcast sur les Demoiselles de Rochefort.

Méditation, puis sieste!

Ramassage des dernières tomates cerises, complètement vertes, que je vais essayer de faire à la mode pickles. Grignotage de quelques framboises. Admiration devant les anémones du Japon. Constat que le géranium (une envie de mon père) reprend de la vigueur et fleurit de nouveau. Emerveillement sous un joli soleil d'automne, petit temps de lecture au soleil.

Un peu de ménage qui me réjouit car c'est une envie et un plaisir, un moment choisi, pas une contrainte.

Thé avec mon ami F.

Soirée tranquille (cuisine, documentaire sur l'automne, repassage, lecture, bouillotte et tisane).

(Je passe sous silence plusieurs appels de mon père, un peu étranges, émaillant la journée, on verra demain).

Sensations de satisfaction, de paix, de sérénité.de joie, de bonheur.


kelloucq - 00:22 - rubrique Actualités - Version imprimable - Permalien - 0 commentaires

Dimanche 19 Octobre 2025

A bout de souffle













Les pertes qui se succèdent, parlons-en. C'était le sujet du dernier post. Je le vis pleinement cette semaine car mon père a franchi une nouvelle étape dans ses difficultés respiratoires.

La maison de retraite l'a adressé aux urgences où il est resté une petite demie-journée, très affecté et somnolent pendant quelques heures jusqu'à ce qu'une séance de VNI (Ventilation non invasive) le ravigote, qu'il retrouve de la force et réclame à cor et à cri de rentrer à la maison (de retraite). 

J'ai apprécié les échanges avec l'interne et les infirmières des urgences qui m'encourageaient à appeler régulièrement et prenaient le temps de m'expliquer la situation, y compris celui de me demander mon avis sur la volonté de mon père de faire la séance de VNI ou pas, puisqu'à ce moment-là, il n'était pas entièrement cohérent.

Il est donc rentré dans la soirée. Mais aujourd'hui, je l'ai trouvé branché non-stop sur l'oxygène, qu'il utilisait déjà parfois. Mais pas toute la journée et pas tous les jours. Aujourd'hui, il était fatigué et s'endormait. Il n'est pas venu déjeuner avec nous, mais a pris son déjeuner plus tard dans sa chambre avec appétit avec de retomber dans le sommeil toute l'après-midi. On voit qu'une phrase longue lui est difficile, l'amène au bord du tolèrable, à bout de souffle. Comme un poisson hors de l'eau. C'est flippant d'en faire l'expérience (j'imagine) et flippant aussi d'en être témoin.

Si vous êtes intéressé par le souffle et la respiration, je vous recommande cette conférence du Pr. Thomas Similowski (Respirez... Sou-fflez !) à laquelle j'avais eu le plaisir d'assister en février de cette année.


Image du site de la Fondation du Souffle.



kelloucq - 20:03 - rubrique Actualités - Version imprimable - Permalien - 0 commentaires

Samedi 27 Septembre 2025

Maladie, pertes, déchirure intime et résilience

Je vous livre la conclusion d'un article intitulé "Les maladies neurodégénératives s'invitent et les pertes se succèdent" publié dans le Journal des Psychologues en 2021 par une psychologue qui s'appelle Ivy Daure. Cet article qui s'appuie sur deux cas cliniques m'a semblé personnellement très pertinent car il porte sur les conséquences de l'annonce d'une maladie neurodégénérative sur l'ensemble du système familial et sur chacun des individus qui le composent. L'autrice s'adresse à des lecteurs psychologues bien sûr, mais je pense qu'on peut tous y trouver une voie.


"La violence de l’annonce et de l’évolution progressive

inéluctable et implacable de la maladie avec sa déferlante

de symptômes provoque ce que Michel Delage nomme la

« déchirure intime ». L’auteur la définit ainsi : « Toutefois, il est

des situations où c’est l’espace intersubjectif lui-même qui se

déchire. La catégorie du familier se perd ; à sa place surgit celle

de l’étranger, voire de l’étrange. » (2008.)

Cette déchirure a lieu quand un des protagonistes de la

relation vit une expérience qui le change profondément

et par conséquent influence la nature de la relation. Les

maladies neurodégénératives deviennent elles-mêmes

le facteur qui signifie le changement, mais l’évolution et

les pertes presque quotidiennes d’autonomie, d’aisance,

transforment l’expérience de vie, les rôles et les missions

de chacun.

Il faut une bonne dose de résilience, à l’intérieur du système,

pour suturer cet intime déchiré, tisser de nouveaux liens et

retrouver une certaine paix ainsi qu’un peu d’espoir pour soi

et les autres.

Le psychologue doit, dans ces situations, évoluer avec

tact, face à tant de douleur, et, dans la mesure du possible,

accompagner les personnes à réinventer leurs relations,

à retisser des liens, à renouer les affects, pour eux et

les générations à venir."


* Michel Delage est un psychiatre français né en 1943 qui a rapproché la théorie de l'attachement et la pensée systémique. Dernièrement, il s'est intéressé à la question de l'attachement chez les ainés.

kelloucq - 19:00 - rubrique Actualités - Version imprimable - Permalien - 0 commentaires

Samedi 20 Septembre 2025

Au final, rester

 Il y a une semaine, j'étais calme et déterminée. Je devais aller voir mes parents pour le déjeuner du dimanche et il était évident que je devais revenir avec une réponse à la question en suspens : rester à la maison de retraite ou essayer de rentrer chez eux.

Je veux dire (ou redire) que, pour moi, leur séjour temporaire était vraiment temporaire au début. Pas de plan préconçu. Vraiment. Les débuts ont été chaotiques, ma mère très désorientée, mon père très critique. Et puis les retours des autres visiteurs ont commencé à me mettre la puce à l'oreille : à eux, mon père semblait dire qu'il y avait de bons côtés et ma mère leur paraissait plus tranquille qu'avant, voire que ces dernières années.

Et pour ma part aussi, je constatais de nombreux avantages : quand ma mère, puis mon père eurent des moments de faiblesse physique, de difficultés respiratoires, les infirmiers sur place purent faire le nécessaire immédiatement. La kiné, en place en juillet, arrêtée une partie d'août, reprit et donna à mon père une occupation utile. L'ergothérapeute, attentive et à l'écoute déjà avant leur arrivée, proposa plusieurs solutions à l'un et à l'autre.

Il y a environ trois semaines, la réponse s'est imposée à moi : pour leur sécurité et leur bien-être, la maison de retraite était plus bénéfique que la maison tout court. Je sais que de nombreuses personnes, devant moi ou pas, ont fait passer ce message à mon père. Mon espoir était qu'il les entende et prenne lui-même la décision.

Dimanche dernier, j'ai pris la route en me disant qu'une conversation devait avoir lieu et aboutir à une décision. Si mon père ne lançait pas la discussion, j'aillais devoir le faire. Quelques minutes après mon arrivée et avant le déjeuner, c'est lui qui a abordé le sujet et m'a fait part de leur/sa décision de rester. Je le sais : par de gaité de coeur, pas son premier choix, mais c'est quand même sa décision. Et pour cela, je lui suis très reconnaissante.

Et pourtant cela ne veut pas dire que je suis complètement tranquille avec cette décision. C'est malgré tout un déchirement, une peine, une forme d'échec.

kelloucq - 23:12 - rubrique Actualités - Version imprimable - Permalien - 0 commentaires

Vendredi 29 Août 2025

Rentrer ou rester






















Je n'ai pas écrit un mot depuis le 5 juillet et cette première semaine de juillet où je retrouvais ma liberté. J'ai profité de ce mois de juillet, puis de ce mois d'août simplement. En vacances ou au travail, il y avait une différence majeure : je n'avais pas à m'occuper de mes parents tous les soirs où je suis dans le Poitou et tous les weekends. Certes, je suis le plus souvent revenue à temps pour aller les voir et soit déjeuner, soit diner avec eux à la maison de retraite ou une fois à l'extérieur un samedi de marché très animé. C'est l'avantage d'une maison de retraite en centre-ville. Et d'ailleurs demain pour mon anniversaire, nous sortirons déjeuner au restaurant de nouveau.

Normalement, le retour était prévu pour aujourd'hui, le 29 août. Mais j'ai suggéré de prolonger d'un mois car nous n'avons pas encore recruté les deux assistantes de vie nécessaires pour assurer le retour à domicile. Comme m'a dit un voisin, assez flegmatique, "c'est du temporaire qui va peut-être durer". Mon père avait dit oui à ce mois supplémentaire, mais en espérant qu'il n'aurait pas lieu d'être. J'ai des candidates et des candidates de qualité, après avoir fait appel à France Travail pour poster une annonce. Cependant, rien n'est fait. Notamment aucune candidate n'est désireuse de prendre le poste de nuit, ce qui est un problème.

Mais admettons que nous trouvions dans les semaines à venir deux candidates pour couvrir l'amplitude horaire nécessaire. Est-ce que le retour à la maison est la meilleure solution? Mon père le réclame à cor et à cri. Pour lui, le plus dur est l'attente pour être aidé (parfois c'est rapide, mais souvent il trouve le temps long et c'est difficile de savoir vraiment combien il attend en moyenne car il n'est pas le plus patient des hommes). Il ne s'est pas non plus investi dans les rencontres avec les autres résidents : je l'avais espéré car il a toujours été sociable et adore discuter. Mais les résidents lui paraissent tous vieux et peu amènes, ils lui renvoient une image difficile à supporter, je pense. Du coup, il participe parfois à des activités communes, mais n'a pas fait de rencontre. On sent bien qu'il se referme de plus en plus sur lui-même et que son intérêt pour les autres diminue. Et puis, comme je le disais dès le début juillet, c'est lui qui gère en première ligne les angoisses de ma mère et c'est assez épuisant.

Et ma mère, comment va-t-elle? Elle a traversé des moments de grande angoisse, parfois de colère. La maison de retraite semble avoir trouvé une solution apaisante non-médicamenteuse : elle passe du temps dans l'unité de vie protégée où elle semble aller avec plaisir et revenir contente, même si elle dit qu'elle n'a "rien fait". Elle ne s'en souvient plus, mais le bilan semble plutôt positif. Cela donne aussi des temps de repos à mon père par la même occasion. Ces derniers temps, plusieurs conversations téléphoniques ont été positives. Elle était détendue. Dans ces conditions, est-ce bénéfique de lui faire vivre un nouveau changement? A ce stade, leurs besoins sont peut-être divergents et pourtant il n'est pas envisageable qu'ils se séparent, dixit mon père. Et en effet, cela ne serait pas plus facile à organiser.

En supposant un retour à domicile avec les aides nécessaires pour couvrir mes absences à Paris et ici quand je travaille, cela me laisse quand même de larges moments où je serai l'aidante active et surtout les weekends. Cela me ramène au rythme que j'ai connu de septembre à juin. Retour dans la Vienne dès la fin du travail le vendredi soir, plus de weekends libres, peu de marge de manoeuvre pour sortir le weekend même avec ma mère, mes soirées de début de semaine également happées. D'aucuns me suggèrent que je dois penser à moi et que le rythme envisagé n'est pas tenable pour quelqu'un qui travaille (plus qu'à plein temps) et qui, de plus, reprend des études à la rentrée. Et ce n'est pas faux.

Alors que fait-on? Aujourd'hui, je rencontre la directrice de la maison de retraite avec mon père pour évoquer ces sujets, faire le bilan de leur séjour, entendre un autre avis, laisser mon père aussi cheminer. Car il peut exprimer que ce n'est pas possible que m'occuper d'eux "bouffe ta vie". Ca, il le sait et le dit. Mais dès le lendemain, il m'appelle pour savoir où j'en suis de trouver du monde pour qu'ils rentrent chez eux!

Alors, je me répète, que fait-on? Suite au prochain épisode. Je n'ai pas la réponse, mais je reste sereine. Nous trouverons une réponse. Pas la réponse idéale car elle n'existe pas pour toutes les parties concernées à la fois, mais une réponse.

kelloucq - 03:32 - rubrique Actualités - Version imprimable - Permalien - 0 commentaires

Samedi 05 Juillet 2025

Maison vide




















"Mardi, mes parents se sont installés pour l'été dans une maison de retraite." Phrase très simple avec sujet, verbe, compléments circonstanciels de temps et de lieu si on faisait un exercice de grammaire.

On pourrait ajouter d'autres compléments pour donner plus de précisions et de sens à cette phrase : un complément de manière ("pas de gaîté de coeur"), de cause ("en raison de la lourdeur de l'aide nécessaire pour qu'ils restent vivre chez eux"), de but ("pour avoir plus de variété dans leur vie et pour que nous puissions prendre un peu de repos après 10 mois sur le pont"). Je viens d'apprendre qu'il existait un autre complément circonstanciel : de concession ("malgré leur manque d'envie" comme dans "ils se sont installés dans une maison de retraite, malgré leur manque d'envie").

D'ailleurs, écrire "ils se sont installés" est un peu un abus de langage car la voix active implique un acte volontaire de leur part dont ils auraient été les agents. Il serait plus juste sans doute d'utiliser une fois active avec d'autres agents et d'écrire "Mardi, nous avons installé mes parents dans une maison de retraite pour l'été". Ou bien carrément d'écrire "Mes parents ont été installés dans une maison de retraite par nous pour l'été".

Si on passe aux maths, je pense que mon cerveau est à 75% convaincu que c'est la bonne décision parce que des aidants épuisés sont un double danger, pour les personnes aidés et pour eux-mêmes. Mais il reste ces 25% de mon cerveau qui me disent que c'est horrible, que je suis égoïste, que cette décision leur sera délétère.

Et ce n'est pas ma mère qui aide à apaiser mon sentiment de culpabilité. Elle qui en chemin nous a répété en boucle des phrases comme : "On n'a jamais fait ça dans la famille" (c'est faux d'ailleurs, elle-même "a fait ça" à sa propre mère), "Si c'est pour finir comme ça, je préfère crever vite",...Et toujours pas elle qui ce soir, au téléphone, a refusé très séchement de me parler en exprimant bien haut sa colère.

Et mon père enfonce aussi le couteau dans la plaie en me disant au téléphone chaque fois qu'on se parle que "Ca ne va pas pouvoir durer, on va rentrer" parce qu'il a beaucoup de mal à cohabiter avec ma mère, complètement perdue, en boucle et impossible à apaiser, surtout pour quelqu'un qui n'est pas au mieux de sa forme lui même.

Longtemps, il a été celui qui, au quotidien, devait tranquilliser ma mère, lui répéter les choses, la faire sortir des ornières dans lesquelles elle s'enfonce. Mais depuis 10 mois, ce sont nous qui avons pris ce rôle, épargnant beaucoup mon père. Depuis 5 jours, il est de nouveau en première ligne avec un effet boomerang qui doit être terrible. Et en même temps, il a perdu cette position privilégiée où une, deux, voire trois personnes accourraient dès qu'il exprimait le moindre besoin. Les deux effets combinés doivent être assez dévastateurs.

Et là dessus, je vais aller dormir car, depuis mardi, la fatigue accumulée semble me tomber dessus en force. Je vais aller dormir dans cette maison qui était pleine et qui est désormais vide. Et demain, j'irai leur rendre visite pour la première fois, je déjeunerai avec eux, je prendrai la température.


kelloucq - 23:22 - rubrique Actualités - Version imprimable - Permalien - 0 commentaires

Plus d'articles :

Calendrier

Décembre 2025
LunMarMerJeuVenSamDim
1234567
891011121314
15161718192021
22232425262728
293031    

Tribune

  • kelloucq : Hélène, je veux bien vous répondre, mais je ne trouve pas d'emails sur votre blog.
  • catherine : hello, je viens de passer trois heures de lecture ;c'est trop top ,dirait Clément, votre parcours m'a ramené en 1986 que de souvenirs ! je vous embrasse .
  • Julien : Et hop un nouveau blog dans notre BlogRoll! Sympa la "double-traducti on", mais ce serait encore plus sympa de l'annnocer : je me suis retrouver a lire tout le paragraphe en Anglais avant de me rendre compte que c'etait le meme qu'en Francais!
  • kelloucq : Julien, mon blog est un blog d'habitués principalement! Je ne leur explique rien, ils savent tout.
  • name :
  • Mercatini di Natale : Ou on peux trouver dans le web les PC a 100 dollars en vente?
  • kelloucq : Ils ont été vendus aux particuliers nord-américains pendant quelques semaines (ils devaient aussi en acheter pour une donation à un enfant). Mais en gros, ils ne sont pas pour le marché des particuliers.
  • IteseeVer : Hello!
    Nice site ;)
    Bye
  • NICKNAME :
  • Stephanie : Wow!
  • une mamie de France :
  • mamie Coco ! : Bravo ! bravo ! ! à très bientôt !

Réagir :
Nom
Adresse web